…mais en 7 jours. Voici des raportages de leur voyage par membre, Jean-Luc Uyttendaele.

PREMIER JOUR: APT - DONZÈRE
Il y avait beaucoup de monde sur le parking de la gare d’Apt pour nous encourager, deux jours après le départ de la première équipe, pour aller à Paris. Des collègues de travail, des amis, de la famille, et plusieurs cyclistes du CC-Apt qui nous ont accompagnés une vingtaine de kilomètres. Le parcours de ce premier jour, que nous a tracé notre président, empruntait la véloroute du Calavon, puis celle de la via Venaissia, et de multiples routes vicinales pour gagner Donzère, but de la journée après 120 kilomètres. Après la fraîcheur du matin, le pique-nique le midi à l’ancienne gare de Jonquières, la chaleur de l’après-midi au milieu des cultures de la vallée du Rhône. Soirée pizza sur la place de Donzère avec quelques bières belges. De l’énergie pour le lendemain au milieu de la bonne humeur locale… Un petit mot pour nos accompagnatrices dans leur voiture, Dany et Michèle, avec l’intendance et leur bonne humeur, sans lesquelles, même la plus préparée des équipées ne peut réussir. À demain !
DEUXIÈME JOUR: DONZÈRE– CHANAS
Pour cette deuxième étape, une histoire de ponts et de pluie ! Des ponts sur le Rhône, du côté de Chateauneuf, puis de La Voulte, puis entre Tain-L’Hermitage et Tournon et après Saint-Vallier. Mais on a toujours su faire la différence entre la gauche et la droite (les rives bien sûr !) Même avec la pluie qui s’est invitée pour les trente derniers kilomètres, transformant la Via Rhona tantôt en annexe du fleuve, tantôt en piège avec coulées de boue, flaques immenses, et risque de glissades… Heureusement, on s’est retrouvé pour le pique-nique avec Michèle et Dany. On a vu beaucoup de cyclistes, des seniors et des jeunes, mais aussi des écoliers innombrables avec leurs instits. Tous à vélo ! Une réparation au départ avec Coco qui s’est mis à déjanter sérieux ! Bref on a vu le groupe 2 endormi et le groupe 1 presque noyé ! Le mot de la fin pour Karina : « On n’est pas fatigués !
TROISIÈME JOUR: CHANAS – SAINT-DIDIER SUR CHALARONNE
Troisième étape vers Paris pour le groupe 1 du CC-Apt. Après la pluie du soir, le soleil du matin et un chat un peu méfiant qui attendait le petit déjeuner. Les quarante premiers kilomètres ont été merveilleux sur les berges du Rhône qui retrouve des couleurs nature et la vie animale et végétale que l’on voulait limiter à nos goûts… L’envie ne nous a pas manqué aussi de nous arrêter dans le vignoble et les caves de Condrieu. Plus on avançait, plus on redoutait la traversée de Lyon à vélo, accueillis comme des moucherons dans un nid de frelons. Ce fut plutôt le contraire, banlieues et rocades franchies. La capitale des Gaules a rendu une belle place aux mollets. Déjeuner sur les berges de la Saône et passage (seulement) devant la maison Bocuse. Et on continua de papoter avec la belle affluente du Rhône. Les dernières dizaines de kilomètres ne furent pas les plus marrantes sur une départementale au régime autoroutier. C’est là qu’on découvrit une piste cyclable s’achevant par deux marches de pierres bien taillées, avec la volonté locale : que le cycliste qui passe y trépasse !
QUATRIÈME JOUR: SAINT-DIDIER-SUR-CHALARONNE – BEAUNE
Quatrième étape, avec nos excuses aux followers pour le retard. Nous n’avons pas su résister le soir à la Maison Jules plutôt que de raconter nos aventures… Nous n’avons pas regretté d’être partis un peu plus tard le matin pour tracer un autre circuit, le long de la Saône, la Voie Bleue, bien plus agréable que les départementales encombrées de véhicules. Voyager dans le silence entre ciel et eau… Rouler, réparer, manger, vivre finalement... On a mis en commun encore un peu plus nos différentes pratiques de la bicyclette pour tendre vers cet objectif commun, Paris. On a croisé, rattrapé, été doublés par beaucoup d’autres cyclistes qui allaient aussi vers la capitale ou voyageaient tout simplement. On a encore côtoyé la folie furieuse autour des villes quand on ne pouvait faire autrement. Jolies façades à Chalon-sur-Saône. On s’est un peu perdu dans une forêt haute et sombre, éventrée par une autoroute qui ressemblait à une fourmilière. Enfin, on a cheminé sur la route des grands crus de Bourgogne, croisant pas mal de « vieux tacots », avant d’arriver à Beaune, sur des routes redevenues chemins et des chemins qui n’en étaient plus tout à fait. Oui, on a tenu face à la fatigue, qui ne se cachait plus, chacun à sa manière et en forgeant notre destin commun.
CINQUIÈME JOUR: BEAUNE – CHASSIGNELLES
Cinquième étape en commençant par le café de Nathalie, comme la guide, nous a-t-elle dit en préparant le petit-déjeuner. Et en poursuivant par une longue côte de près de dix kilomètres, heureusement peu pentue, sous le crachin bourguignon. Entrée en matière ! On s’est arrêtés devant la mairie de Bligny-sur-Ouche, au fond de sa vallée, où la maman de l’un d’entre nous est née et a vécu. On a continué avec les toboggans, ces petites côtes, pour aller d’un village au suivant, jamais très longues ni pentues, mais qui finissent par faire mal aux pattes si on les sous-estime. Le vent, heureux de nous voir, prenait de l’embonpoint au fil des kilomètres pour nous retarder. En passant près de Painblanc, il y avait longtemps qu’on l’avait mangé. Même le long du canal de Bourgogne, il savait nous trouver…. Le ciel était si bas, comme dans la chanson de Brel, que le canal s’y est perdu. Et nous on savait que pour passer il fallait faire preuve d’humilité, sous le regard de péniches ventrues néerlandaises et de bateau de croisière qui attendaient les beaux jours. Et c’est un peu de l’histoire de France que l’on arpentait puisque Henri IV y pensa dès 1605. Du Pont d’Ouche, nous l’avons presque toujours suivi jusque le terme de notre étape, Chassignelles.


SIXIÈME JOUR –CHASSIGNELLES - CHAMPIGNY
Sixième étape. Après une bonne nuit et un petit-déjeuner somptueux, nous avons retrouvé le canal de Bourgogne. Pas bien difficile, il coulait paisiblement sous nos fenêtres. Quel contraste avec la Provence ! Eau, humidité, du vert partout, hérons, silence… Les ponts jetés sur la tranchée transformaient le chemin de halage en cols miniatures de première catégorie. Les roues projetaient l’herbe tondue des bas-côtés sur nos cadres et sacoches. On croisait d’autres cyclistes bien plus raisonnables ou moins, au regard de leurs bagages. Et des pêcheurs qui espéraient. Nous on n’espérait pas les crevaisons, mais il y en eut. Le repas d’adieu avec le canal arriva, grâce à Dany et Michèle. Si les cantinières ont contribué aux succès napoléoniens, elles, nous permirent d’avancer vers la victoire avec une organisation au top, qui ne leur laissa guère le temps de visiter.
Le canal fut vite oublié avec les toboggans retrouvés au milieu des prairies à bovins et des champs à céréales. Qui a créé ces déserts pour… nourrir les hommes ? Le vent toujours défavorable ne nous oublia pas une seconde. Puis on arriva, là où étaient maintenant les hommes, sur une mer d’asphalte, de béton et de moteurs. Et le stress qui va avec. Avec le vent hargneux, on retrouva une pluie drue et sans pitié pour les vingt derniers kilomètres, une route noyée avec camions et voitures qui fuyaient. L’hôtel fût le bienvenu, échoué sur un bord de nationale au parking défoncé et sa jeunesse envolée. Heureusement, l’Anglaise, actrice d’un film fellinien, rattrapa le coup. Je ne vous en dirai pas plus. Les autres vous raconteront sûrement… Moins drôle fût la nuit, avec un couple infernal qui discuta au moins de ses vingt dernières années… En fin d’après-midi, on a rencontré le club sportif braytois qui rassemble toutes les associations de la commune, dont les cyclotouristes. Ils nous ont accueillis dans le cadre de « Tous Ensemble à Paris ». Et on a parlé… vélo avec l’apéro !
SEPTIÈME JOUR. CHAMPIGNY – JOINVILLE-LE-PONT
Petit préambule. L’écriture est comme le vélo, plus les jours passent, plus on allonge… Septième étape. Aujourd’hui, du sérieux : départ pour la capitale. Autrement dit : voitures ou pas ? Le débat fut vite tranché : plus on fuit les grandes routes, plus on fait de kilomètres. On décida donc d’aller au plus court au rendez-vous des cyclos de Saint-Maur, qui allaient être notre nounou pour la journée. De la bonne départementale, heureusement sans trop de circulation le samedi, mais avec le même vent frontal que la veille. Je résume : soixante kilomètres en faux plat montant ! Avec le vent et bien vite sa copine la pluie. J’ai longuement réfléchi à la psychologie du pêcheur d’éponges après quarante années de vie professionnelle, au milieu des champs immenses de céréales, de colza, de légumineuses.
Passage à Vaux-le-Vicomte devant le château de Nicolas Fouquet, surintendant des finances de Louis XIV. Beau mais aussi noyé que nous. Retour bien vite au vent de face. Déjeuner à Soignolles-en-Brie avec les nouveaux copains dans le bar-PMU proche de l’église. Presqu’un village provençal ! Re-départ vent fort, pluie et vêtements auto-lavants. Vous connaissez le froid qui vous colonise insidieusement ? Ce n’est pas : « Coucou, c’est moi ! » mais « Coucou, j’y reste ! » À choisir, je préfère ensuite les routes campagnardes noyées aux rues tout aussi noyées et débordantes de voitures dont les pèlerins cherchent leur voie, et agrémentées de diverses peintures au sol qui veulent vous faire changer de trajectoire… On fit le détour par la Cipale (aphérèse de « piste municipale »). Bonne pioche. Toutes les misères endurées depuis le départ disparurent instantanément, chassées par quelques ombres cyclistes célèbres.
Karina, requinquée, trouva même la web télé de la FFV pour nous rejouer jazzy, comme Marylin dans « Certains l’aiment chaud ». Arrivée à l’hôtel de Joinville-le-Pont. Douche-séchage-lustrage. Départ pour le rendez-vous des cyclos PACA venus à Paris. Discours, remises de souvenirs (on lira ça bien mieux par ailleurs) et buffet avec toutes les spécialités locales de notre chère région. Puis diverses fantaisies musicales chantées où les « montagnards » se révélèrent les meilleurs. Nous, on n’oublia pas de fêter les 78 ans de Michael, encore plus « charming ».
HUITIÈME JOUR. JOINVILLE-LE-PONT – PARIS
Huitième et ultime étape. Sept kilomètres pour participer à un défilé pas banal dans Paris, d'une trentaine de kilomètres, sur les grands boulevards, les avenues et le long de la Seine… Quel cyclotouriste renoncerait à un tel évènement ? Contrairement à l’apocalypse qu’annoncent les fâcheux, je vois là les choses qui changent. Qui aurait parié un franc il ya trente ans sur cet « Ensemble à Paris » ? Bon il y avait encore un petit air de salon de l’Agriculture et un côté « La croisière s’amuse ». Les régions et la capitale ont signé il y a longtemps pour un mariage de raison, pas pour une union fruit de l’amour… Oui j’ai vu de l’énervement chez certains, bloqués par des « vieux à vélos ». Mais j’ai vu de la tolérance chez beaucoup d’autres. C’est pas mal la tolérance en ce moment.
Huitième étape (suite et fin) - Il y a déjà beaucoup de cyclistes dans Paris, mais que l’on bloque fermement avec pas mal de sécurité (des centaines de bénévoles ?) la circulation pour laisser défiler des vélos venus d’ailleurs, cela me semble nouveau. Et ce qui est nouveau pour les Parisiens, ne serait-ce pas bon pour les « terroirs » que nous sommes ? Je crois qu’on mettra du temps à réaliser ce qu’on a vécu ce dimanche 2 juin 2024, à une moyenne incroyablement faible, marchant parfois, ne réussissant pas toujours à profiter de la vue pour ne pas tomber en touchant l’un ou l’autre… Personnellement, j’ai hésité, voyant d’abord une grande pagaille. Puis j’y suis allé et j’en suis revenu heureux. Et les kilomètres, la pluie, le vent, le froid, les crevaisons, les erreurs de parcours, les petits ennuis… ont disparu d’un coup. Pfuiiit ! Il ne restait que du bonheur !
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